La diplomatie comorienne est le parfait manuel de tout ce qu’il ne faut pas faire dans les relations internationales. Si vous en doutez, l’annonce de la réconciliation entre Riyad et Téhéran finira par vous en convaincre.

Le Royaume d’Arabie Saoudite a décidé de rétablir ses relations diplomatiques avec la République Islamique d’Iran. Sous les auspices de la Chine, les deux adversaires du golfe persique, ont pris l’initiative d’enterrer la hache de guerre, rouvrir leurs ambassades respectives et renforcer leur coopération, après des années de brouilles.
Dans un suivisme aveugle, en 2016, sous Ikililou Dhoinine, les Comores ont rompu les relations avec Téhéran, et en 2017 sous Azali, l’ambassade du Qatar est à son tour invitée à plier bagage. Moroni ne ménageait aucun effort pour être dans les petits papiers de la Maison des Saouds.
Aujourd’hui, saoudiens et qataris s’entendent comme larrons en foire, mais l’Union des Comores a perdu un allié stratégique, car les investissements du Qatar dans notre pays étaient substantiels. Le richissime émirat ne lésinait pas sur les moyens, construction de l’Hôpital de Hombo, ouverture de plusieurs usines dont la société nationale de pêche, reprise de l’hôtel Retaj, une aide budgétaire de 40 millions de dollars… La liste des actions bénéfiques de Doha est longue. L’iran n’était pas en reste, dans un pays au système sanitaire sous équipé, le Croissant Rouge iranien était une clinique qui venait en aide aux plus démunis.
La politique étrangère comorienne doit cesser ce que les experts en diplomatie appellent « le ralliement opportuniste ». Ce positionnement est dévalorisant et nous fait perdre le respect dans le concert des nations. Nous devons être des alliés et non des alignés qui prennent parti dans des conflits qui ne nous concernent ni de près ni de loin.
Mais notre ministère des Affaires étrangères n’a pas tiré des leçons du passé, sur le dossier du Sahara Occidental, il commet la même erreur, il s’est mis à la remorque du Royaume Chérifien alors que l’on devrait adopter une attitude de neutralité et servir d’intermédiaire dans la résolution des conflits. L’Algérie, le Maroc et les Sahraouis, dans quelques années, trouveront une solution et se réconcilieront et une nouvelle fois, les Comores se retrouveront sur la paille.
Il semble que les politiciens comoriens en général et nos diplomates en particulier n’ont pas encore compris que ce sont les intérêts comoriens qu’ils doivent servir et défendre avant tout autre considération. Le grand professeur de relations internationales, Bertrand Badie a dit, plus un gouvernement est faible, illégitime et impopulaire à l’intérieur du pays, plus il s’aligne à des états forts à l’extérieur, pour espérer qu’ils lui garantissent sa survie.
Notre diplomatie est à contre-courant de la marche du monde. La guerre en Ukraine a démontré que les nations du Sud pensent leurs intérêts avant ceux des autres, la diplomatie de l’alignement est un paradigme obsolète. C’est le retour des égoïsmes nationaux. Les acteurs internationaux n’hésiteront pas à se servir de nous pour avancer leur agenda et nous jeter quand on ne leur sera plus d’aucune utilité. A nous de sortir de cette naïveté enfantine et penser à l’intérêt des Comores d’abord.
Toute honte bue, nous voilà obligés d’ aller tête baissée, toquer à la porte du Qatar et de l’Iran en espérant qu’ils veuillent bien nous pardonner. Quelle berezina diplomatique. Il est temps que ça change.
Mohamed Moussa Alcomorya
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