C’est une opération coup de poing qui risque de changer la face de Mayotte pour le meilleur si tout se passe bien ou pour le pire si les choses venaient à dégénérer. Les médias français et mahorais ont annoncé qu’une opération massive de destruction des bidonvilles et d’expulsions de sans papiers, appelé « WUAMBUSHU se déroulera après le mois sacré du ramadan, d’avril à juin 2023.

Photo: Gendarmerie de Mayotte
500 gendarmes viendront en renfort des 1300 forces de l’ordre déjà sur place. Le journal « Canard enchaîné » a l’origine de ces révélations parle d’un véritable « corps expéditionnaire » qui va envahir l’île au lagon.
Si la résorption de l’habitat insalubre, est une initiative salutaire, les méthodes musclées qui y seront employées peuvent mettre le feu aux poudres et dégénérer en affrontement à grande échelle. D’autant que ce type d’évacuation se doit de s’accompagner de relogement or pour l’instant on ignore où habiteront ses milliers de familles une fois leurs habitations de fortune démolies.
L’opération s’annonce d’une telle ampleur que la section régionale du Syndicat de la magistrature française s’est fendue d’un communiqué pour exprimer ses craintes d’une chasse aux comoriens sans papiers et d’une justice expéditive qui cherche à faire du chiffre au détriment des procédures.
« Nous craignons que les magistrats n’aient d’autres choix que d’être au service d’une politique pénale du tout répressif et expéditive, dans une ambiance de chasse aux sans-papiers et de potentielles émeutes. Ces choix se font au mépris d’enquêtes pénales plus approfondies qui permettraient de lutter plus activement contre les atteintes à la probité et d’une montée en puissance de la justice civile, seul vecteur d’accès au droit pour tous. » Peut-on lire dans le communiqué.
Côté comorien, les politiciens se sont déjà emparés du sujet. Samedi 4 mars, lors de sa conférence de presse Mouigni Baraka Said Soilihi, ancien gouverneur de l’île de Ngazidja et un des leaders de l’opposition, à mis en garde Azali Assoumani, sur les répercussions désastreuses, d’un accueil massif de jeunes délinquants nés à Mayotte, ayant grandi seuls dans les rues, sans éducation et qui ne connaissent rien des 3 autres îles de l’archipel dont leurs parents sont originaires.
« C’est une bombe que l’on veut nous envoyer. Si on accepte de les accueillir, on ne fera que déplacer la criminalité de Mayotte vers les autres îles. Azali s’en moque car ils ne cambrioleront pas Beit Salam, ce sont les citoyens qui subiront les conséquences» a indiqué Mouigni Baraka avant de poursuivre:
« Je suis allé à Mayotte et j’ai vu la situation difficile dans laquelle vivent les mahorais à cause de la délinquance. On ne peut que déplorer ce qu’ils subissent. Mais ces jeunes sont nés à Mayotte, certains ont perdu leurs parents en mer et non donc aucune attache dans les autres îles, la solution passera par la réinsertion et l’apprentissage d’un métier pour qu’ils n’aient plus besoin de voler pour vivre.»
Quant à Idrisse Mohamed du Mouvement Ukombozi, il n’hésite pas à comparer la cette opération à la déportation des juifs par les nazis :« Quelle va être l’attitude du gouvernement comorien face aux milliers de Comoriens dont des femmes et des enfants, qui vont se retrouver campant dans les rues de Maore dans des conditions sanitaires épouvantables, jetés en pâture à des policiers sans scrupules et à des hordes haineuses encouragées et encadrées dans leurs forfaitures ?
Le président de l’Union des Comores, Azali optera-t-il pour les pirouettes et se cacher derrière des « négociations » secrètes illusoires puisque les Français clament à qui veut l’ entendre que Maore est française et qu’il ne peut pas être question de négociations en la matière. Le président de l’Union Africaine, Azali, ignorera-t-il ce qui se trame contre un peuple africain qui va subir ce que les juifs ont subi sous l’Allemagne nazie? »
Cette opération a fait réagir également en France. La députée Estelle Youssouffa tente de s’approprier l’initiative qu’elle voit comme le résultat de son appel à un « choc de souveraineté » à Mayotte. Le député André Rougé, Délégué à l’Outre-mer du Rassemblement National dénonce un coup de communication de la part du Ministre de l’Intérieur Gérard Darmanin:
« à la veille du grand débat sur le projet de loi immigration présenté à l’Assemblée nationale, cette opération bienvenue apparaît plus comme un coup médiatique que d’une réelle volonté de rétablir l’ordre qui s’impose, et encore moins de tarir la source de l’immigration comorienne qui ne cesse de s’amplifier » déplore le parlementaire européen dans un communiqué.
Ainsi donc des juges et des politiciens français dénoncent cette opération, qui ne vise pas réellement à améliorer la sécurité de nos frères mahorais mais simplement à servir des petits calculs politiciens en France. Comment, dans ce cas, le gouvernement comorien pourra -t-il collaborer à l’expulsion massive de sa propre population sur un territoire reconnu comme comorien par de nombreuses résolutions de l’ONU et par la constitution comorienne, sans se rendre coupable de haute trahison?
En jugeant l’ancien président Sambi et ses collaborateurs comme Dossar et Nourdine Bourhane pour haute trahison, le gouvernement actuel a ouvert une boite de pandore qui ne se refermera pas d’aussitôt. Plus aucune autorité grande ou petite ne sera à l’abri de la Justice si elle allait à l’encontre des intérêts supérieurs de la nation, même plusieurs années après avoir quitté le pouvoir.
Tout comorien qui coopérera à la rafle et à l’expulsion massive de ses propres concitoyens, sera tenu pour un traitre à la nation et un « collabo » coupable d’intelligence avec une puissance étrangère et devra répondre de ces actions devant l’histoire et la justice.Mohamed Moussa Alcomorya.
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