
Il y a six ans, le 26 mai 2016, à l’issue d’une présidentielle aux résultats serrés et âprement disputés, Azali Assoumani, le coran en main, prête serment devant la Cour Constitutionnelle, dans un stade Baumer plein à craquer, en présence de deux anciens Présidents, Ikililou Dhoinine et Sambi.
C’était la troisième alternance démocratique consécutive aux Comores. Trois passations de pouvoir pacifique d’affilée, un record pour une nation, qui par le passé, s’était taillée une réputation comme la championne des putschs et coups d’État.
Naïvement, on s’était mis à rêver que l’instabilité politique était derrière nous, que la culture démocratique était bien enracinée et que notre attention allait désormais se focaliser sur le développement économique.
C’était d’ailleurs ce que promettait le nouveau président. On l’a oublié mais dans sa première conférence de presse au Retaj, en mai 2016, après son élection, Azali avait battu en brèche l’idée d’organiser des assises. » wakomori ngwaona mahutadjio muhimu yawahondra enkomio rahana assises nationales » il expliquait qu’il ne sert à rien de faire des réunions éclairées à la bougie, qu’il fallait régler les problématiques prioritaires telles que l’eau et l’énergie.
De belles paroles qui se sont envolées. Le locataire de Beit Salam a mené une politique à l’opposé de ses promesses. Il a démoli les acquis démocratiques. Nous devons être le seul pays au monde avec la Corée du Nord et les monarchies absolues, à avoir une assemblée nationale sans aucun député d’opposition. Sur 54 communes aucun maire ne s’oppose au régime. Mais vous trouverez des partisans du pouvoir nous expliquant que ce monocolorisme politique est le signe d’une démocratie vivace.
Ce régime a perdu du temps et de l’argent, dans des assises, dialogue et autres conférences, mais après six années de règne sans partage, même fournir en électricité et en eau, 24 heures sur 24, uniquement la capitale, il n’y arrive pas. Le reste du pays, n’en parlons pas.
Alors que le coût de la vie et les prix ne cessent d’augmenter, le salaire misérable des enseignants et de nombreux fonctionnaires n’a pas changé d’un centime. Par contre, dans les 100 premiers jours après son investiture, les salaires des ministres ont été revus à la hausse.
Lors des négociations avec l’intersyndicale, le gouvernement a indiqué qu’il ne peut pas revoir la grille indiciaire avant d’avoir fait un toilettage des listes des fonctionnaires car des écoles de certains villages manquent d’enseignants.
Ils réagissent comme s’ils venaient d’arriver au pouvoir. On peut s’interroger sur ce qui a empêché les ministères concernés d’effectuer ce travail, durant ces six ans.
Lors de la campagne de 2016, la CRC avait imprimé un fascicule détaillant le programme d’Azali. Dessus il y avait les maquettes d’un nouvel aéroport international, de nouvelles banques, un hôpital moderne, des gares routières… De la poudre de perlimpinpin. Aucun des grands chantiers prévus n’a abouti, hormis les routes, en termes d’infrastructures le pays n’a connu aucune progression.
Combien d’années faut-il, par exemple, pour bâtir de simples amphithéâtres pour nos universités qui en sont toujours dépourvues?
Le slogan phare: « un jeune, un emploi » a été relégué aux oubliettes, dès sa première année des centaines de jeunes ont été radiés de l’administration publique et des sociétés d’Etat.
Là où il fallait recruter des médecins et des professeurs, ils ont recruté des militaires. Quand il fallait ouvrir des fermes agricoles et une petite industrie manufacturière pour réduire notre dépendance alimentaire, ils étaient trop occupés à emprisonner leurs adversaires politiques.
Six ans d’incompétence, d’autoritarisme et d’amateurisme au sommet de l’Etat. Un gâchis sans nom.
Mohamed Moussa AlComorya
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