Par Soilihi Kays: De prime abord, ces photos n’ont aucun lien. Et pourtant, elles sont une illustration d’un triste constat.

A chaque fois qu’un Comorien voit les images des manifestations de masse dans les capitales Africaines hier à Tananarive, Bamako et aujourd’hui à Dakar , il se pose la question suivante :
« Pourquoi chez moi, le peuple ne se soulève pas aussi pour contester ce régime dictatorial sanguinaire qui nous étouffe depuis le 12 avril 2018? » La réponse se trouve dans l’autre photo.
Ce bâtiment est le lycée Saïd Mohamed Cheikh de Moroni. C’est là où bon nombre des fossoyeurs de notre pays actuels comme d’hier ont fait leurs études. L’état de délabrement dans lequel il se trouve actuellement est à l’image de notre système éducatif dans ce pays, totalement abandonné.
Et pourtant, l’école est censée former les citoyens de la République et des patriotes convaincus. Parce qu’ il ne suffit pas d’avoir des murs décatis et des enseignants, l’Etat doit surtout définir la mission de l’école.
Nous sommes le pays qui a refusé d’enseigner sa propre histoire à ses enfants. Mais comment peut-on espérer que les enfants Comoriens aiment leur patrie alors qu’en leur privant de leur propre histoire , il serait difficile de s’identifier aux héros de la nation.
Détrompez vous, malgré le retard insupportable accusé dans presque tous les domaines, il ne faut pas croire que tous les politiques Comoriens sont des lâches et des irresponsables. Certains ont voulu bien faire dans leurs domaines respectifs, mais étant minoritaire dans un marécage de Caïmans, ils sont étouffés.
Le niveau des élèves expliquent en partie cette lâcheté collective dont on fait preuve face à la dictature. Car nos lycéens, et autres étudiants sont dépourvus de culture politique et d’analyse critique.
Hier, les grands frères du Msomo wanyumeni, avaient des ambassadeurs du quotidien prêchant, ici et là, leurs idées dans les villages et places publiques. Les étudiants qui ont défilé à Moroni pour réclamer le départ des mercenaires avaient la plupart d’entre eux déjà lu un tract du Front démocratique ou ont participé à une réunion clandestine avec leurs délégués respectifs.
Donc pour eux réclamer la fin de la dictature et le départ des chiens de guerre de Denard étaient une évidence. Car ils avaient bien assimilés les enjeux du moment.
Aujourdhui quel parti politique comorien anime une formation de militants? Quel cercle de jeunes cadres intellectuels débat sérieusement de nos problèmes dans ce pays? Reconnaissons tous que l’absence d’une mobilisation contre la dictature ne se résume pas seulement, à un refus de dénoncer une dictature d’Azali et chauffer la place pour ceux qui ont régné avant? Non, le mal est plus profond et prend ses racines dans notre système éducatif qui ne forme pas des citoyens républicains capables de se sacrifier pour des nobles causes.
Défaillant en terme de niveau et gangrené par la corruption de toute sorte , l’école forme des voleurs en puissance et des tricheurs de toute sorte entre autres . La culture démocratique a déserté l’école.
Combien d’enfants dans nos écoles primaires connaissent la signification de la coopérative scolaire? Même pour désigner un délégué de classe dans certains établissements, le prof principal le désigne selon ses convenances.
Le mal dans le pays est tellement profond à tel point que même ceux qui sont censés nous défendre en cas de violation de nos droits sont incapables de s’entendre sur un simple règlement intérieur. Parce que la culture de la triche a touché cette corporation jusqu’aux os.
Dans tous les cas, le combat pour la refondation de notre système éducatif demain est la mère de toutes les batailles. De Bamako, à Tana , en passant par Dakar, cette jeunesse est avertie, mieux formée et consciente du fait que militer pour l’État de droit et la dignité du peuple, n’ est pas un service qu’on rend à un quelconque politicien , mais qu’il est d’abord un geste qu’on fait pour sa dignité d’Homme libre qui se bat pour la société la plus juste possible.
Malgré ce sombre tableau, je reste très optimiste tout de même car d’autres leviers de communication nous aident à pallier certaines carences. Il est temps de formater le logiciel qui dit que « hamwana ariao kapvendre tranga » pour enfin actualiser un autre maxime que nos illustres aïeux clamaient dans leur détermination pour l’émancipation nationale : » Mtsaha ungwana kauwono » Un des leaders du Mouvement démocratique pour la rénovation malgache (MDRM) disait ceci: « la liberté est comme un morceau de chair attrapé par un chien, il ne le lâchera pas parce tu le lui demandes . Il faut l’arracher. »
Soilihi Kays pour Alcomorya.net – Ne pas copier. Toute reproduction interdite –

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