La Russie dénonce la militarisation de Mayotte et soutient les Comores

En choisissant le rapport de force avec les Comores, la France se tire une balle dans le pied.

C’est un soutien de poids que vient de recevoir l’Union des Comores dans son refus de la militarisation de Mayotte par la France. La Russie deuxième puissance militaire au monde hausse le ton par la voix de la porte-parole de son Ministère des Affaires étrangères, Maria Zakharova.
Moscou considère « les informations sur la possible construction d’une nouvelle base militaire sur l’île comme une récidive des instincts néocoloniaux de Paris. Il s’agirait d’une démonstration claire de son refus de respecter l’intégrité territoriale de l’Union des Comores et de son approche sélective des résolutions de l’Assemblée générale des Nations unies ».

Cette déclaration intervient en plein rapprochement diplomatique entre les Comores et la Russie. Le 24 mars, un communiqué du ministère comorien des Affaires Étrangères annonçait: « Le Gouvernement de l’Union des Comores agrée la demande des Autorités de la Fédération de Russie, d’établir une Ambassade auprès de l’Union des Comores.
L’établissement de cette Ambassade à Moroni permettra de rapprocher l’Union des Comores et la Fédération de Russie, qui entretiennent des relations bilatérales depuis plusieurs années, et d’ouvrir de nouvelles perspectives de coopération entre les deux pays
. »

Bien que les russes avaient fait cette demande depuis un moment, le président Azali Assoumani n’a jamais donné une suite favorable, pour ne pas froisser Paris.
Le dirigeant comorien est un francophile qui n’a jamais affiché la moindre hostilité envers la France, ses adversaires politiques lui reprochent même sa soumission et son alignement systématique sur les positions du Quai d’Orsay.

Alors qu’à l’ONU, beaucoup de pays du Sud Global s’étaient abstenus, les Comores avaient voté en faveur de la résolution condamnant la Russie pour son invasion de l’Ukraine. Pour dire à quel point, les russes n’avaient aucune influence à Moroni.

Mais Les déclarations belliqueuses envers les Comores des Ministres Manuel Valls, Bruno Retailleau et la classe politique française en général, à l’exception notable du Parti Communiste, ainsi que l’évocation d’une nouvelle base militaire navale, ont fini par convaincre le gouvernement comorien de la nécessité de se trouver des alliés pouvant peser dans ce bras de fer qui s’annonce contre la France.

L’opposition comorienne pour la première fois, fait bloc avec le régime Azali, pour dénoncer la France. Dans un communiqué signé par de nombreux partis, elle demande que l’ambassadeur de France soit convoqué mais aussi:
« Nous prions également les autorités en place de prendre les dispositions nécessaires pour l’inscription à l’ordre du jour de la prochaine Assemblée Générale de l’Organisation des Nations Unies, l’examen pour débat de la question de l’occupation illégale de l’ile comorienne de Mayotte. »

D´autres voix s’élèvent, à l’instar de l’historien Kays Soilihi, pour appeler à ce que les Comores accueillent des bases militaires Américaines et Chinoises, sur le modèle de Djibouti, pour contrecarrer la l’hégémonie française dans l’archipel.

La violence des attaques des politiciens français envers les Comores est irrationnelle. Le taux d’exécution des OQTF de Mayotte vers le reste des Comores est de 100% soit 25 000 expulsions en 2023. À titre de comparaison ce taux est de seulement 7% dans l’hexagone, des pays comme le Maroc n’ont accepté que 357 expulsions par an. Mais pour plaire à l’extrême droite Mahoraise et Française, les Comores qui accueillent plus d’expulsions que tous les autres pays du monde combinés est devenu la bête noire de la classe politique française. Une attitude dénuée de toute logique qui a fini par nuire aux intérêts français à l’international.
D’ailleurs, la porte-parole du ministère des Affaires étrangères de la Russie, Maria Zakharova a également évoqué ses expulsions durant son point de presse:

« Nous sommes convaincus que la base militaire déjà existante sur Mayotte n’est pas tant destinée pour se protéger contre des menaces extérieures hypothétiques, que pour contrôler le territoire d’outre-mer détenu illégalement. C’est l’un des derniers « vestiges de l’époque coloniale » où les autorités françaises expulsent de force les
Comoriens, les considérant comme des « migrants illégaux ».
»

C’est pour éviter que la France se retrouve ainsi, clouée au pilori sur la scène internationale, que les spécialistes de la géopolitique qui composent le Quai d’Orsay ont toujours privilégié le dialogue plutôt que les rapports de force avec les Comores.

Si les autorités comoriennes ont toujours joué la carte de l’apaisement plutôt que la confrontation, la donne a changé, reste à savoir jusqu’où ira ce changement de paradigme.

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