Édito: Gerald Darmanin veut fixer un rideau de fer entre Mayotte et le reste de l’archipel. Azali Assoumani l’aidera t-il avec un coup de marteau?

Msutru wa shuma, un rideau de fer. Voilà ce que promet le ministre de l’intérieur français M. Darmanin lors de sa visite sur l’île.
Pendant ce temps, l’homme chargé de défendre l’intégrité territoriale des Comores, Azali Assoumani, se dit ému parce que M. Macron lui a passé un coup de fil pour le féliciter de sa « réélection ». À peine remis de ses émotions il s’est envolé pour Abidjan afin d’assister à la finale de la CAN.
Il a sûrement entendu que le tube à la mode là bas à « Babi » c’est la chanson « coup du marteau ». Exactement ce qu’il faut à M. Darmanin pour fixer son rideau de fer, un coup de marteau.
Si Wuambushu 1, a tourné au fiasco, c’est parce que les élections étaient à l’approche. La présidentielle finie, la France pourra compter sur le coup de pousse et de marteau d’un Azali Assoumani tout ému par l’appel téléphonique de l’Elysée, pour mener à bien Wuambushu 2.
Dans un vaste coup de communication, Darmanin promet également de supprimer le droit du sol. Une décision saluée par la droite et l’extrême droite françaises. Tout cela n’est que de la poudre de perlimpinpin, pour endormir les Mahorais, tout en sachant qu’il sera difficile voire impossible de la faire voter. Même si cela passait, il y a une forte probabilité que cette mesure soit rétorquée par le Conseil Constitutionnel. Mais comme l’a si bien dit Jacques Chirac « les promesses n’engagent que ceux qui les reçoivent»
Mayotte vit dans un paradoxe permanent. Les Mahorais veulent être un département comme tous les autres, tout en exigeant des lois qui n’existent dans aucun autre département français.
Croire que la suppression du droit du sol, empêchera, une anjouanaise qui nécessite une césarienne de venir accoucher à Mamoudzou, ou un blessé grave de venir se faire opérer à Mayotte, ça relève de l’absurde. Un scanner à l’hôpital de Hombo ou Bambao Mtsanga, diminuera le nombre de kwassas de manière beaucoup plus significative qu’un radar. Ouvrir un organisme de microcredit pour les femmes du Nyumakele, empêchera plus de départs vers Mayotte que n’importe quel radar ou frégate.
Plutôt que d’hisser des rideaux de fer, notre archipel a besoin bâtir des passerelles économiques. Si la classe politique mahoraise abandonne ses postures anti-comoriennes et adopte une attitude pragmatique envers les Comores. Il existe des voies et moyens de travailler en bonne intelligence pour résoudre la crise sécuritaire qui frappe Mayotte.
Aucun comorien ne se réjouit de la violence qui règne sur cette île sœur, contrairement aux théories du complot des populistes qui voient une instrumentalisation comorienne des flux migratoires.
Si Ben Issa Ousseni et le conseil departemental ont le courage de faire un pas vers les Comores, des propositions concrètes existent. il est envisageable, par exemple, de créer des centres éducatifs fermés à Anjouan pour accueillir les mineurs délinquants. Des associations anjouanaises peuvent créer des structures d’accueil pour des séjours de rupture, pour ces jeunes, le tout financé par le dispositif départemental de protection de l’Enfance.
Beaucoup de départements français proposent ce genre de séjour, il n’y a donc aucun obstacle juridique. Cela peut soulager Mayotte, créer des emplois à Anjouan et offrir une seconde chance à ces jeunes.
Le gouvernement comorien est irresponsable d’accepter d’accueillir ces masses d’expulsés sans qu’aucun encadrement soit prévu sur place à Anjouan. Sachant qu’ils retourneront tous à Mayotte à la moindre occasion.
En ce qui concerne le démantèlement des bandes qui sèment la terreur, il serait nécessaire que les Mahorais mettent les rancœurs de côté et acceptent l’envoi temporairement d’un escadron de gendarmes comoriens pour sécuriser les zones les plus dangereuses.
Des forces de l’ordre françaises venues de Bretagne ou de Poitou-Charentes, ne sauront jamais maîtriser le terrain Mahorais comme des gendarmes venus d’Anjouan habitués à opérer dans des conditions similaires.
Il ne fait aucun doute que si le PIGN comorien intervient à Mayotte, en quelques semaines, il viendrait à bout des bandes qui terrorisent l’île. Et que personne ne dise que c’est impossible, « Mayotte c’est la France » . Même si l’on admettait que c’était le cas, la coopération policière internationale existe depuis des lustres.
Il faut des solutions comoriennes aux problèmes de l’archipel des Comores. Il n’est pas normal de croire qu’un politicien de Tourcoing, qui ne pense qu’à sa carrière politique, viendra régler nos problèmes, en hissant un rideau de fer entre les habitants de Sada, Tsingoni et Mtsamboro d’une part et ceux de Domoni et le Nyumakele de l’autre. Des habitants qui ont des liens de sang, qui remontent à plusieurs siècles.
Comment comprendre que les européens ont détruit le mur de Berlin et supprimer les frontières entre leurs pays, mais souhaitent venir les reconstruire entre nos îles?
Ceci n’est qu’une liste non exhaustive de toutes les contre propositions que la partie comorienne peut poser sur la table pour résoudre la crise sécuritaire mahoraise. Encore faut-il que des deux côtés un leadership courageux et pragmatique émerge.
