La CRC cannibalise la fonction publique et en fait un argument de campagne | Al Comorya

A l’approche des échéances électorales de 2024, le parti d’Azali Assoumani veut capturer la fonction publique, en conditionnant implicitement la nomination à des postes clés à l’adhésion à la CRC.

Par Mohamed Moussa

Le parti présidentiel CRC s’est lancé dans une vaste  campagne pour recruter de nouveaux membres. Une tournée est organisée dans les trois îles. Le lundi 26 juin, ce fut le tour de la capitale, d’accueillir les sympathisants au Foyer des femmes de Moroni. Jusque là rien de plus normal.

Tous les partis du monde aspirent à enregistrer le plus d’adhérents possible. Sauf que lorsque l’on écoute attentivement les discours lors des différentes étapes de cette tournée, on ne peut s’empêcher de constater que la formation politique fait miroiter des postes à responsabilités dans l’administration, pour attirer de nouvelles recrues. 

D’ailleurs, dans la liste des personnes fraîchement encartés, grand nombre d’entre eux sont dans la fonction publique. Président d’université, chargé de communication d’un ministère, DAF d’une société d’Etat, les profils des nouveaux membres de la CRC laissent craindre un mélange des genres inacceptable où la formation politique et l’administration publique finissent par ne plus se distinguer. 

Une pratique qui n’existe que dans les régimes à parti unique, comme la Chine, où l’Etat et le PCC Parti Communiste Chinois, se confondent. Toutes les démocraties qui se respectent imposent la neutralité politique et le devoir de réserve aux fonctionnaires. Le recrutement dans l’administration  se base sur la méritocratie et non sur des considérations partisanes, car les employés de la fonction publique n’occupent pas des postes politiques. La CRC peut promettre les postes de députés, gouverneurs ou ministres à ses adhérents car ce sont des fonctions politiques, mais elle n’a nullement le droit de s’approprier les services publiques et les sociétés d’État. 

Aux Etats-Unis, une loi fédérale « Hatch Act » datant de 1939, interdit à tout employé de l’administration fédérale de militer ouvertement dans un parti. Cette loi a été votée suite aux soupçons que le parti démocrate nommait ses partisans dans une agence gouvernementale. 

Depuis lors, certaines catégories de hauts fonctionnaires américains n’ont plus le droit de participer à des campagnes électorales. C’est le cas dans de nombreux pays à tradition démocratique. 

Chez nous, c’est l’inverse. Les hauts fonctionnaires cherchent à tout prix à afficher leur soutien au parti au pouvoir, quel qu’il soit, dans l’espoir d’une nomination ou de tout simplement garder son poste. Cette pratique d’un autre temps doit cesser. On a vu ce que les nominations partisanes de la CRC à la tête d’ONICOR,, Sonelec, SCH ou Comores Télécom… ont engendré comme gestion calamiteuse et corruption. 

À l’approche des échéances électorales, le parti présidentiel doit faire face à son bilan catastrophique. Après huit années de pouvoir sans partage, il y a peu de réalisations à mettre à son actif.

Le slogan de 2016 « un jeune, un emploi » a laissé un goût amer aux milliers de jeunes licenciés depuis l’arrivée au pouvoir d’Azali. Le parti dont Belou est l’égérie, n’a rien pour attirer la jeunesse qui se désintéresse de la politique ou milite majoritairement dans l’opposition. C’est pour séduire ces jeunes, que Nour Elfath est envoyé en première ligne, avec des promesses de postes à pourvoir pour attirer les plus naïfs. 

Pourtant sans système de méritocratie, l’administration comorienne et donc le pays tout entier est condamné à patauger dans la médiocrité.