
Mohamed Bajrafil vient d’être nommé ambassadeur des Comores à l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture UNESCO.
C’est un choix qui me semble judicieux et mérité pour cet homme de culture, ce théologien auteur de plusieurs ouvrages ayant obtenu un certain succès, ce professeur dans les universités françaises, qui a su se faire une réputation de débatteur hors pair, lors de ses diverses interventions médiatiques.
Avec un tel représentant, c’est le pays qui gagne. On peut espérer que les Comores brilleront dans le concert des nations, en tout cas, il ne nous couvrira pas de ridicule.
Mais certains ne l’entendent pas de cette oreille et c’est leur droit. Ils affirment qu’accepter d’être nommé ambassadeur par Azali, c’est soutenir son régime. Au-delà de ce radicalisme de façade d’une frange extrémiste de l’opposition, se pose un réel débat ancien et universel, sur la limite entre servir l’Etat et servir un régime.
Dans les années 40 sous le régime de Vichy, La Résistance française s’est trouvée face à une question similaire. Quelle attitude adopter envers les haut fonctionnaires qui veulent continuer à servir l’Etat sans pour autant cautionner la collaboration.
Plutôt que de mettre tous ceux qui travaillent avec Vichy dans le même sac. Les résistants regroupés dans le CFLN (Comité Français de Libération Nationale) ont créé une « commission d’épuration administrative » qui avait pour mission faire la distinction entre les élus, fonctionnaires et agents publics qui par leurs actes ou écrits ont porté atteinte aux institutions constitutionnelles ou aux libertés publiques fondamentales et les autres qui se sont contentés de servir l’Etat et servir leur pays.
Ceux-là ont pu continuer à mettre leur talent au service de la France, lorsque le régime de Vichy fut battu.
C’est cette nuance qui manque à ceux qui poussent des cris d’orfraie à l’annonce de la nomination de Bajrafil.
Représenter Les Comores à l’UNESCO, à un concours de gastronomie ou à la Coupe d’Afrique des Nations, ne peut être considéré comme un soutien au gouvernement en place, même si c’est celui-ci qui finance cette mission de représentation.
Parfois on a l’impression que certains adoptent des postures jusqu’au boutistes et sans concession pour couvrir leur frustration et leur sentiment d’impuissance face à un régime autoritaire qui s’enracine.
Pourtant pour que le camp de la démocratie gagne il faut de la lucidité et de la clairvoyance.
Suffisamment pour faire la différence entre d’un coté, les propos abjects du nouvel ambassadeur des Comores en France, Amada Hamadi, qui dans ses prises de paroles démontrent qu’il sert un régime et non l’Etat comorien, et de l’autre Bajrafil qui se contente d’accepter d’aller représenter son pays dans un organisme consacré à la Culture et l’Éducation.
Si demain Bajrafil se transforme en défenseur du régime Azali, alors, oui il sera justifié de l’indexer et je serais de ceux qui le critiqueront car il sera devenu un serviteur d’un gouvernement et non de l’Etat.
Quand on n’arrive plus a faire la différence entre les bourreaux qui ont ordonné la torture et l’assassinat de Bapale et un imam, essayiste qui accepte de représenter son pays, c’est que l’on est aveuglé par un extrémisme qui par définition ne laisse que peu de place à la nuance.
Mohamed Moussa Al Comorya.
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