
Tislam Sambi a accordé un entretien exclusif à Al Comorya sur l’emprisonnement de son père l’ancien Président de la République Ahmed Abdallah Sambi.
Depuis le 18 mai 2018, votre père a perdu sa liberté. Comment votre famille vit-elle cette épreuve et tout particulièrement votre mère ?
Depuis bientôt 3 ans, notre vie a basculé. Les jours passent et se ressemblent dans une tristesse certaine. Aujourd’hui, plusieurs milliers de comoriens et comoriennes sont bouleversés par la situation de mon père, alors, tout le monde peut imaginer la souffrance de toute notre famille.
Du jour au lendemain, ma mère s’est retrouvée à devoir éduquer, soutenir et guider, seule, leur 7 enfants. Ma mère est une femme digne et croyante à qui je rends un vibrant hommage pour son courage face à cette épreuve. La situation, bien que difficile, nous rappelle encore plus l’importance de la foi.
Avez-vous le droit de communiquer avec lui, avez-vous de ses nouvelles ?
Lors des 3 mois de mise en résidence surveillée illégale par la décision de Said Abdou Djae, un simple secrétaire du Ministre de l’Intérieur, mon père avait accès à ses téléphones et nous pouvions l’appeler et le voir par appel vidéo.
Mais depuis le 19 août 2018, le juge d’instruction Ali Amane lui a retiré tout moyen de communication. Ainsi, depuis cette date, nous n’avons de ses nouvelles qu’à travers les personnes qui lui rendent visite. Aucune personne n’est autorisée à lui rendre visite avec un téléphone, donc depuis le 19 août 2018, je n’ai ni vu, ni entendu la voix de mon père.
Au-delà des rumeurs, quel est son état de santé ?
Mon père est un sportif, qui avait une vie saine avant son emprisonnement arbitraire. Depuis 1 an et demi, son état de santé est instable : il est sujet à des rechutes dont la gravité ne fait qu’accroître à mesure que le temps passe.
J’en profite pour remercier chaleureusement le Docteur Said Ali Abdou Petit qui se rend disponible, à toute heure de jour comme de nuit pour l’assister lors de ces rechutes.
Une ordonnance judiciaire, que tout le monde a vu, avait même reconnu que son état de santé nécessitait une évacuation médicale. Tous les comoriens savent que cette ordonnance judiciaire n’a jamais été appliquée puisqu’elle a été bloquée par des personnes dont les voix sont, semble-t-il, au-dessus de la loi.
On connaît Sambi le rais, Sambi le fundi, mais comment est Sambi le père de famille? Quels rapports vous entreteniez avec lui, avant sa détention ?
Sambi le Père de famille est un homme ordinaire, d’une grande famille, qui éduque ses enfants avec tout l’amour et l’affection qu’un père porte aux siens. C’est un exemple pour nous, une fierté de porter son nom et d’avoir son sang dans nos veines.
Sambi est un père qui ne frappe pas ses enfants pour les éduquer, mais au contraire, les punit avec des exercices physiques puis passe du temps à leur expliquer la vie, les pièges de la jeunesse et le rôle à tenir dans une société.
C’est un père qui n’hésite pas à demander pardon à un de ses enfants
si, par inadvertance, il l’a puni pour un fait dont il le pensait coupable, à tort.
Voilà le genre de père qu’est Ahmed Abdallah Mohamed Sambi.
Nos relations étaient au beau fixe puisque c’est le meilleur père qu’un enfant puisse avoir.
Quelles sont les valeurs les plus importantes qu’il vous a transmises ?
A travers son éducation, mon père nous a transmis plusieurs valeurs qui guident notre quotidien, dont les plus importantes sont : les valeurs islamiques, l’humanisme envers chaque être humain, et la générosité envers les plus démunis.
Permettez-moi de vous indiquer, simplement, deux phrases qu’il nous a répété depuis notre plus tendre enfance :
« Dans la vie, soyez des acteurs et non des spectateurs »,
« Le meilleur cadeau que tu puisses offrir à tes enfants est leur père (pour les filles) ou leur mère (pour les garçons), donc choisis bien ».
Vous avez étudié le droit, que pensez-vous de cette affaire d’un point de vue purement juridique ?
D’un point de vue purement juridique, cette affaire est une véritable mascarade qui fait honte au système judiciaire de notre pays. La lettre envoyée à Azali par Sambi, qui n’a d’ailleurs jamais reçu de réponse ni été contredite, a permis d’indiquer de nouveaux éléments, qui prouvent encore une fois que cet ex-Président, et citoyen de notre pays, est détenu de façon totalement arbitraire et illégale.
Deux infractions principales lui sont reprochées et ont fait le tour du monde : une corruption par des autorités Émiraties et un détournement de fonds publics de la citoyenneté économique.
S’agissant de la corruption, Sambi a indiqué dans sa lettre qu’il n’a jamais détenu de compte bancaire à l’étranger durant son mandat. Ainsi, toute transaction ne pouvait se faire qu’avec ses comptes bancaires aux Comores.
Alors, est-ce-que le juge d’instruction Ali Amane a trouvé une trace de cet argent ou d’un compte bancaire à son nom à l’étranger durant son mandat ? NON.
Est-ce que des autorités émiraties ont confirmé cette accusation, portée par le rapport Dhoulkamal ? NON.
Est-ce que le juge Ali Amane a les identités de ces corrupteurs, le montant de la corruption, ou encore le moyen utilisé pour remettre l’argent à Sambi ? NON.
Est-ce que le juge d’instruction Ali Amane a la moindre preuve d’une quelconque corruption ? NON.
S’agissant du détournement de fonds publics, tous les juristes savent que pour détourner quelque chose, il faut la détenir au préalable. Seul un détenteur peut détourner. Alors, est-ce-que Sambi a détenu les fonds de la citoyenneté économique ? NON.
Qui gère les fonds publics de l’État comorien ? C’est le Ministre des Finances.
Alors, est-ce-que les Ministres des Finances de Sambi ont indiqué avoir remis de l’argent de la citoyenneté économique à Sambi ? NON.
Tous les Ministres des Finances sous Sambi et pendant l’application de la loi sur la citoyenneté économique ont été entendu, sauf Ikililou qui était aussi Ministre des Finances sous Sambi durant cette période, et qui n’a jamais été entendu par le juge d’instruction Ali Amane, ni en tant qu’ancien Ministre des Finances de Sambi, ni en tant qu’ex-Président de la République ayant appliqué cette loi durant 5 ans.
Les deux Ministres entendus ont indiqué lors d’une confrontation que Sambi n’a jamais détenu de l’argent public, et encore moins l’argent de la citoyenneté économique, qui rentre directement dans un compte bancaire de la banque centrale des Comores.
Les comoriens ont vu l’historique de l’activité de ce compte bancaire qui a commencé dès le début de la fabrication des passeports économiques en mars 2009.
Au jour d’aujourd’hui, Sambi n’aurait jamais dû être inculpé dans cette affaire, et pourtant il a perdu presque 3 années de sa vie, qu’il ne pourra jamais rattraper.
Ainsi, d’un point de vue purement juridique, Sambi aurait dû bénéficier depuis longtemps d’un non-lieu, mais la réalité est toute autre.
Qu’est ce qui est le plus urgent pour vous, l’évacuation sanitaire ou la tenue de son procès ? A quoi bon un procès s’il n’est pas en état de se défendre ?
Un procès ? Avec quelle preuve ? Et surtout, aujourd’hui avec tous les éléments démontrant clairement que la loi ne lui est pas appliquée de façon impartiale, avec toutes les procédures qui n’ont pas été respectées, avec la violation flagrante du délai de détention, qui ose encore croire à un procès qui serait équitable ?
Quel comorien a encore confiance en la justice de ce pays ?
Mon père a toujours cru en la justice de son pays et il a toujours craint l’injustice. Force est de constater que la seule véritable intention de cette affaire depuis le début est de l’humilier, de salir son nom et de le faire souffrir.
La justice n’est qu’une notion théorique lorsqu’il s’agit de Sambi et bien d’autres personnes. Elle n’existe plus pour lui, ni pour les autres.
Moi, en tant que future avocate, je demande un non-lieu car c’est la seule réponse légale et légitime qui s’impose depuis longtemps au juge Ali Amane et au Procureur Mohamed Abdou.
Son état de santé est notre priorité. Rien n’est plus important pour nous que son accès à des soins médicaux adéquats le plus vite possible.
Comment jugez-vous l’attitude du parti Juwa concernant la détention arbitraire de son Président d’honneur ?
A partir de votre question, je profite de cette occasion pour remercier tous les comoriens et comoriennes, les ainés, les adultes comme les plus jeunes, y compris les dirigeants, les adhérents, les sympathisants de sa famille politique Juwa, ainsi que les amis non comoriens de mon père, pour tout ce qu’ils ont fait et qu’ils continuent à faire pour réclamer sa libération.
Je sais que beaucoup prient pour lui, d’autres interviennent activement sur les réseaux sociaux par des vidéos et des articles, certains sur les plateaux de télévisions, de radios ou dans les journaux, tandis que d’autres contactent des Etats, des institutions internationales, des organisations, ainsi que des grandes personnalités. A toutes ces personnes, je leur dis merci du fond du cœur.
Selon vous, quelle est la meilleure manière pour ses soutiens et ceux qui sont simplement épris de justice, d’aider votre père ?
Selon moi, la meilleure manière d’aider mon père, à l’heure actuelle, est de ne surtout pas se décourager. Il faut continuer à lutter pour sa libération, car notre cause est juste.
Continuons à réclamer sa libération, à dénoncer cette séquestration et à agir vaillamment pour qu’il ne passe pas un jour sans que le monde ne sache qu’un innocent et d’autres personnes souffrent et meurent à petit feu.
Mohamed Moussa Al Comorya – Ne pas copier. Toute reproduction interdite –
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Merci pour votre interview je trouve que votre site est très intéressant c’est peut être le site que je consulte souvent mais je trouve que vos vidéos sur Facebook et YouTube manquent beaucoup les comoriens
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Excellente interview et qui met toutes les choses au clair en relatant simplement les faits. Merci pour votre travail journalistique Al Comorya. Beaucoup de courage à la famille SAMBI, cette mascarade ne fait que vous honorer, honorer notre ex-Président, et vous en ressortirez vainqueurs inshaAllah. Sourate Ibrahim (S14: v.42)
وَلَا تَحْسَبَنَّ ٱللَّهَ غَٰفِلًا عَمَّا يَعْمَلُ ٱلظَّٰلِمُونَ ۚ إِنَّمَا يُؤَخِّرُهُمْ لِيَوْمٍ تَشْخَصُ فِيهِ ٱلْأَبْصَٰرُ
Et ne pense point qu’Allah soit inattentif à ce que font les injustes. Ils leur accordera un délai jusqu’au jour ou leurs regards se figeront.
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Méfiez-vous de l’invocation de l’opprimé…, il n’y a pas de voile entre elle et Allah…
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