
La multiplication de fuites de vidéos d’interrogatoires et notamment dans l’affaire des affrontements meurtriers de mars 2018 à Kandaani, démontre à ceux qui en doutaient encore, le haut degré d’amateurisme de l’appareil sécuritaire de l’Union des Comores.
Il y a eu la vidéo de l’interrogatoire de Saleh Assoumani, celle du journaliste Toufé Maecha, puis les « aveux » de Feu Commandant Faycal Abdoussalam, et la dernière en date montre Wirdane le rescapé de la fusillade de mars 2018. Toutes ces vidéos ont fuitées sur le net. Nous sommes loin de l’exemplarité et de l’éthique que la population est en droit d’attendre des représentants de la loi.
Dans un État de droit qui se respecte, cela s’appelle une violation du secret de l’enquête. Une procédure aurait déjà été engagée à l’encontre de l’ agent à l’origine d’une telle fuite. C’est ce qui s’est passé en Tunisie, après qu’un policier ait fuité la vidéo des aveux de l’auteur de l’attentat du Bardo. Le policier a été arrêté immédiatement et mis à la disposition de la justice.
C’est ainsi que les choses se passent, lorsque des personnes responsables et instruites gèrent la sécurité d’une nation. Chez nous, on s’interroge. La brigade de recherches de la Gendarmerie Nationale est-elle entre les mains de petits plaisantins qui cautionnent ses fuites et se donnent un malin plaisir a discréditer et jeter l’opprobre sur les forces de l’ordre?
Il semble que malgré les formations qu’ils reçoivent, malgré les diplômes qu’ils affirment avoir obtenus, beaucoup de haut gradés de la police et la gendarmerie comoriennes ignorent toujours, ce qu’est le code de déontologie. Sont-ils au courant des notions de secret professionnel et du devoir de discrétion qui sont à la base de leur métier ?
Le pire c’est ce qu’ils ne se rendent pas compte du grotesque et du ridicule dans lesquels ils s’enlisent. Les interrogatoires sont devenus une télé-réalité dont l’on retrouve chaque semaine un nouvel épisode sur les réseaux sociaux. Il ne manque plus qu’ils nous proposent de voter par sms pour la vidéo de l’interrogatoire que l’on a aimé : «Envoyez 1 si vous avez kiffé les aveux de Wirdane, ou bien envoyez 2 si vous avez préféré les aveux filmés de Saleh Assoumani ».
Ça en serait presque comique, s’il n’y avait pas des morts derrière toute cette farce. Car ce qui est affligeant c’est que trois citoyens comoriens sont décédés dans cette affaire, laissant derrière eux des familles inconsolables. Même respecter les morts c’est trop leur demander.
Si ces gens ont une once d’une humanité en eux, qu’ils exigent que l’enquête sur la fusillade du 28 Mars 2018 soit menée de façon sérieuse, pour que la lumière soit faite. Ce n’est pas en publiant des vidéos d’aveux potentiellement obtenus sous la contrainte que vous convaincrez grand monde.
Je sais qu’il y a chez nos forces de l’ordre, des cadres bien formés et rigoureux. Mais en laissant les brebis galeuses ternir leur réputation, par ce genre d’enfantillages et gamineries, ils ne font que ternir leur image à tous.
La confiance entre citoyens et forces de l’ordre est primordiale pour la paix sociale. Or cela fait bien longtemps que la police a perdu sa crédibilité auprès des citoyens. La gendarmerie par contre a toujours bénéficié d’une aura de prestige et de sérieux. Avec ce comportement, c’est l’ensemble des forces de l’ordre qui ne sera plus pris au sérieux.
Mohamed Moussa Al Comorya.
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